Au Maroc, premières visites de terrain des associations !

Introduction

Entre le 12 et le 29 mai 2025, une mission de terrain a été menée par la chargée du projet FAME au Geres Maroc  auprès des  9  organisations de la société civile (OSC)  intervenant dans le domaine de l’autonomisation des femmes au Maroc et  financées par le projet FAME dans le cadre du premier Appel à Manifestation d’intérêt.  

Ces visites s’inscrivent dans le cadre du suivi du programme FAME et couvrent un spectre géographique large, de Casablanca à Errachidia, en passant par des zones rurales touchées par le séisme d’Al Haouz. Les villes où se déroulent les projets soutenus par FAME actuellement sont  Casablanca, Mohammedia- Ain Harrouda, Tanger,  Marrakech, Fès, Errachidia et Rabat. 

L’objectif était d’observer les activités déployées depuis le lancement des projets en mars 2025,  d’évaluer la qualité des interventions et d’identifier les défis rencontrés par ces actrices  de terrain dans leurs missions d’accompagnement des femmes vers l’autonomisation économique et sociale.

Diversité des approches et des publics cibles

Trois axes d’intervention principaux

Les OSC visitées ont identifié plusieurs freins majeurs à l’autonomisation économique des femmes au Maroc. D’abord, le manque de compétences entrepreneuriales : beaucoup de femmes ont des idées de projets mais ne savent pas comment les structurer, élaborer un business plan ou accéder aux dispositifs de financement. Ensuite, les blocages psychologiques sont omniprésents : manque de confiance en soi, peur de l’échec, crainte de perdre l’aide sociale. Enfin, les résistances sociales et familiales constituent un obstacle de taille, notamment la méconnaissance des droits des femmes et les pressions du conjoint ou de la famille qui découragent les initiatives féminines.

Face à ces défis, les OSC articulent leurs réponses autour de trois axes complémentaires :

L’appui aux initiatives économiques constitue le cœur des interventions, avec des approches variées selon les contextes. Par exemple, l’Association Al Nada à Mohammedia mise sur la formation à l’élaboration de projets et l’accompagnement vers l’auto-entrepreneuriat, touchant une vingtaine de femmes aux profils diversifiés. Un autre exemple : la Coopérative Diyaa à Tanger développe des activités génératrices de revenus dans l’agriculture, impliquant 70% de femmes rurales parmi ses 30 membres.

Le renforcement psychosocial apparaît comme un préalable indispensable. Par exemple, l’AMAFF à Casablanca développe des ateliers sur l’estime de soi, créant un environnement bienveillant qui favorise la prise de parole et la confiance en soi. Dans le contexte post-séisme d’Asni, l’Association Ennakhil intègre systématiquement un volet psychologique pour surmonter les blocages.

La sensibilisation aux droits constitue le troisième pilier, illustré par l’Association NABTA par exemple, qui anime des sessions sur les droits humains et l’égalité de genre, touchant 24 femmes dans une approche inclusive intégrant également des hommes.

Adaptation aux contextes locaux

L’efficacité des interventions repose largement sur l’adaptation aux spécificités locales. L’usage de l’amazighe par l’Association Ennakhil dans la région d’Asni s’avère être une clé de succès pour garantir l’accessibilité et l’ancrage local. Cette attention à la langue et aux codes culturels se retrouve dans l’ensemble des interventions observées, où l’arabe dialectal domine les échanges.

Qualité des interventions : points forts observés

Méthodologie adaptée

Les OSC visitées font preuve d’une réelle maîtrise méthodologique. L’IPDF se distingue par son approche participative de co-construction, mobilisant 25 bénéficiaires et de nombreux acteurs institutionnels (CRI, ANAPEC, OFPPT, INDH) autour d’un dispositif intégré d’accompagnement. Cette méthode permet de construire une vision commune et d’assurer l’appropriation des solutions par les bénéficiaires.

L’Association NABTA illustre l’efficacité d’une pédagogie adaptée, avec des présentations interactives, des échanges dynamiques en questions-réponses et l’utilisation de fiches de post-évaluation pour mesurer les acquis. Cette approche génère une forte interaction et permet d’ancrer les apprentissages dans les vécus des participantes.

Inclusion et mixité

L’inclusion constitue un trait marquant des interventions observées. L’Association NABTA intègre des hommes dans ses ateliers sur l’égalité de genre, favorisant les échanges mixtes. L’Association Al Nada accueille en plus des cibles initialement prévues des femmes issues d’un quartier voisin ayant exprimé des besoins, démontrant une capacité d’adaptation et d’ouverture.

Agir sur les causes du manque d’inclusion économique

Les témoignages recueillis illustrent l’ambition des projets de provoquer des transformations profondes : « Les femmes subissent quotidiennement du harcèlement en allant et en revenant du travail. Elles n’en parlent pas, par peur de perdre leur emploi, leur mari ou leur équilibre familial. Ce silence est lourd, et nous voulons vraiment briser ce tabou et combattre cette violence », confie la directrice d’ATEC lors des Assises du féminisme.

Dynamiques collectives et plaidoyer

Espaces de concertation et construction de plaidoyers collectifs

Les Assises du féminisme organisées par l’APCE à Rabat montrent l’importance des espaces de dialogue entre différents acteurs. Cet événement annuel sur la condition féminine au Maroc a rassemblé pendant deux jours de nombreux participants : associations féministes, personnalités, spécialistes et professionnels de différents domaines (droit, médecine, économie, gestion, représentants d’institutions). Les discussions ont porté sur les inégalités économiques, la précarité et la continuité des financements.

L’événement a permis la co-construction d’un plaidoyer féministe basé sur l’expérience de terrain, avec des recommandations formulées par chaque OSC. Cette approche collective renforce la capacité de plaidoyer des organisations et leur permet d’articuler des positions communes auprès des institutions et des bailleurs.

Conclusion

Cette mission de terrain révèle un écosystème d’OSC dynamique et engagé, développant des approches innovantes et adaptées aux contextes locaux. La qualité des interventions observées témoigne de la professionnalisation croissante du secteur et de sa capacité à répondre aux besoins diversifiés des femmes marocaines.

Des visites qui  permettent surtout de créer un lien de confiance avec les équipes, d’échanger sur les premières impressions liées à FAME, et de poser les bases du diagnostic qui guidera la suite de l’accompagnement. Certaines OSC organisent déjà des formations, d’autres mènent des actions de plaidoyer ou de sensibilisation… Toutes ont en commun une vraie volonté d’agir pour les droits des femmes. 

Articles liés

Réponses

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Fame